BIENVENUE (5E PARTIE)

 

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Il peut pas se poser, c'est une pente. Il s'éloigne. Au moins, j'ai bien fait de choisir la grotte sur ce flanc. Mais cet atout naturel, ça me protègera pas des lustres. Pas contre des chiens ou des bonshommes à pied. Je réfléchis. Ils veulent faire un exemple, c'est ça, mais oui. Il leur faut un exemple, pour montrer aux bailleurs de fond internationaux, ceux qui ont payé l'hélico peut-être, et autres opérateurs de tourisme qu'on ne rigole pas avec la justice ici, que c'est une contrée civilisée, ''safe''. Pas la Colombie. Impunité zéro.

La peur de me faire choper et de passer à la télé menottes dans le dos me trempe le dos. Je vois trop loin, trop vite ? Peut-être. J'commence à flipper ou bien c'est la fièvre, un refroidissement. Vlà que j'tremble, Albert, tiens bon merde. J'me rendors. A mon réveil, je vois le soleil au zénith en sortant prudemment de mon trou de pierre. Un drôle de rêve s'est invité dans mon somme. J'étais sur une autre île. 

Je m'aventure aux alentours de mon refuge. Personne, pas de bruit extraordinaire. Je repense à mon songe : un signe ? Un appel pour quitter cette île qui ne veut plus de moi pour le moment, qui me traque depuis son ciel même ? Je reviens à la grotte pour y rassembler mes idées. Mais je ne parviens pas à tout peser correctement dans cet univers sombre et fermé. C'est dehors, oui c'est dehors face à la mer que je dois penser à la suite. Je m'asseois au pied d'un immense banian qui tapisse le sol de son ombre bienfaisante. Devant moi, une nouvelle fois, la mer et une autre rive, au loin, Marie-Galante. Et si ma chance, c'était ça, Marie-Galante. ? Facile de dégoter un pêcheur qui t'y emmène. J'en connais en plus. Jojo, le pêcheur de Capesterre qu'est marié avec une fille de Calibishie, Mary, lointaine parente d'ailleurs. On était à leur mariage y a deux ans. Après, je sais pas. Se cacher sans doute. Galérer à Marie-Galante. Travailler dans la canne, discrètement, avec les Haïtiens. J'ai souvent entendu dire qu'ils surveillent beaucoup les mouvements de population là-bas. D'un autre côté, si le Jojo qui vient de temps en temps dans sa belle famille grâce à sa grosse barque de pêche, sa saintoise propulsée par deux gros moteurs Mercury, si il pouvait m'embarquer justement, je pourrais peut-être être tranquille à Capesterre. D'autres l'ont fait avant moi. Et pas les plus rusés alors...

Je reviens à l'abri. Toutes ces pistes m'ont sévèrement encombré les méninges. Je m 'endors avec un gros mal de crâne. Je m'éveille brusquement, il est vingt heures. La nuit est étoilée, claire et bien gardée par la lune presque pleine quand je sors le nez de mon chez moi. Je remballe tout, direction Calibishie. En marchant bien, j'y serai vers deux ou trois heures du mat'. La marche est moins difficile qu'à l'aller, le chemin est plus sec, la lune est un précieux auxiliaire et j'ai quelques souvenirs des passages délicats. J'atteinds sans accident la fourche au bout de deux heures. Je descends à droite. Pas un chat sur la route au pied du sentier. Ma montre donne minuit. Encore une ou deux heures de marche et je serai à la maison. Enfin, je compte juste y passer, donner des nouvelles à Cathy, embrasser les petits aussi. Impossible d'y séjourner. Les flics de Calibishie doivent surveiller les parages. Je me faufilerai par la plage, y aura personne à part des chiens qui dorment sur le sable. Je dois alerter ce Jojo. Il me fera passer j'en suis sûr, les étoiles me l'ont dit.

 

 

A suivre

 

 

 

 

 

 

 

 

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