CUIT (2E PARTIE)

Publié le par Vince

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L'équipage assure que l'île ne devrait plus tarder à se montrer à l'horizon. Jean est dressé à la poupe du Ponant, le vent le carresse et le transporte dans un état proche du bonheur. L'homme n'en revient pas  de se tenir dehors si peu vêtu en pareil endroit et à pareille époque. Il respire profondément, lui le terrien qui ne connaît de la mer que les embruns qui les jours de tempête venaient alourdir le fond de l'air du côté de la ferme de ses parents, près de Granville. Jean n'a jamais été un marin. Certes, il voyait presque la mer de chez lui, mais Jean est avant tout un paysan et le cadet d'une famille de cultivateurs normands, sans l'ombre d'un espoir d'héritage. Ce qui l'attire c'est la terre. Et pourquoi pas de l'autre côté de l'océan, comme son voisin avant lui parti pour la Guadeloupe et peut-être comme son petit frère après lui, si l'aventure fonctionne ?


Jean porte un surnom. On l'appelle ''Joyeux'' en raison de son indécrochable naissance de sourire aux lèvres. Il en sait peu sur sa destination. Une île, grande comme Jersey a-t-il entendu dire lors de l'embarquement à Dieppe. Des matelots parlaient également de montagne et d'anglais. Dans sa tête, Joyeux voit de quoi connaître la fortune, grâce au tabac, moyennant trois années tout au plus en qualité d'alloué, c'est-à-dire d'ouvrier engagé auprès d'un colon, d'un ''habitant''. Et après cela, la liberté, surtout celle de s'établir à son compte. Cet avenir exaltant, Jean le pétrit depuis des mois dans sa tête et dans son coeur, chaque matin en se levant, depuis que son voisin a déserté la Normandie pour  une autre promesse, l'île de la Guadeloupe.

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