CUIT (6E PARTIE)

Publié le par Vince

 

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Dans l'après-midi, après que nos nouveaux patrons ont oublié de servir des repas, Maitret nous conduit sur les champs de pétun. Toute l'exploitation est à portée de voix, elle s'étale sur des pentes plus ou moins sévères et regarde le couchant. Guilhem est à deux doigts de s'évanouir tant cette marche est épuisante. Décidément, ce Maitret a des jarrets de cabri. Nous croisons une équipe qui sarcle une parcelle parmi les plus hautes. Les hommes, muets, sont rivés à la pente abrupte. J'ai pu deviner des mines résignées qui ne prêtent aucune attention à leur nouveaux compagnons de peine. En redescendant, Maitret nous apprend que ces gars sont les occupants des petites cases entrevues le matin sur le sentier. Malgré cela, les lieux restent splendides, ces vallons tapissés d'une lumière franche et forte qui glissent vers les eaux marines nous ont stupéfiés. Néanmoins, l'omniprésence de Maitret, ses innombrables ordres et recommandations, ses mises en garde perpétuelles et ces gars croisés en plein labeur nous jettent tous dans le doute. Nous nous sommes regardé, nous les nouveaux alloués, à plusieurs reprises, du regard des hommes qui devinent, qui savent qu'ils vont souffrir. En silence. Trois ans à tenir. Trois années où il faudra se lever à quatre heures chaque jour sauf le dimanche et les jours saints. Où il faudra abattre sa douzaine d'heures au-dessus du pétun, pour défricher, biner, sarcler, planter. Trois ans ? 

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