CADEAU (EPILEUGUE)

Publié le par Vince

 

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VincEpiX

 

Pour l'alimentation de la petite bestiole, Amélie récupère puis trie le plus qu'elle peut. Elle lui ramène des surprises du jardin familial, ou prélève de temps en temps dans son plat un peu de riz ou de patate douce ou de manioc. Et il pousse, il pousse son Lilich. Amélie le garde près d'elle au cours de ses siestes mais le poussin ne bronche pas, tout juste émet-il quelques vagues piaillements qui s'évanouissent dans la torpeur de l'après-midi. 

Un cadeau de la nature, non, ''un trésor'' a répondu Amélie à sa maman quand cette dernière lui a demandé pourquoi elle en prenait autant soin. Les trésors, les pirates avaient l'habitude de les cacher. Amélie est presqu'une pirate avec son Lilich, elle le protège de toutes les convoitises, des griffes des matous, des coups de vent du mois de septembre ou des pluies qui pourraient le refroidir fatalement. Lilich est tout pour Amélie.

La météo est si mauvaise depuis quelques jours dans le ciel guadeloupéen qu'Amélie a décidé, seule, de prendre le poussin avec elle sur sa paillasse pour la nuit. Elle se dit que Lilich est habitué, avec les siestes. Amélie se couche discrètement, blottit le poussin dans un chiffon qu'elle glisse sous son drap, Lilich collabore bien, il est presque muet. Les frères et soeurs qui dorment avec Amélie dans cette petite pièce n'ont rien remarqué. La pluie redouble et tambourine sur les tôles rouillées du toit. Tout le monde dort déjà. Amélie peut en faire de même.

Pas encore l'aube dans cette nuit sans lune et déjà du mouvement dans la case. Le père est debout et moud son café. Amélie ouvre ses yeux qui butent sur l'obscurité. L'antique lampe à pétrole paternelle est bien trop faible pour éclairer correctement. Elle hasarde sa main autour d'elle en quête du chiffon. Rien. Elle la passe sous son oreiller rempli de coton. Rien encore. Alors Amélie sent une petite gêne, là sous son dos. Elle creuse ses reins et ses doigts agrippent le chiffon. Elle porte le chiffon devant elle et le vide. Lilich est bien là, inanimé, mort de trop d'amour.

 

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